Hmmm... Ce n'est pas dans mes habitudes de parler de moi... D'apparence, on vient pas trop me parler parce qu'on dirait que je fais peur aux gens... Peut-être mes influences gothiques, je crois... Ou alors mon expression qui dit "mais qu'est-ce que je m'ennuie"... J'en sais trop rien.

Je suis née avec cette expression sérieuse, j'y peux rien. Bon, je ne suis pas un modèle de joie de vivre, je vous l'accorde, mais je sais quand même apprécier les bonnes choses ! Ce n'est pas parce que je tire une gueule de trois mètres de long que je ne suis pas contente ! Et en plus, en étant aussi sérieuse de visage, ça me permet de faire de l'humour pince-sans-rire assez fréquemment, à tel point qu'on croit que je suis sérieuse alors que je déconne à plein tube. Oui, j'ai un humour décapant, on le dirait pas comme ça...

Sinon, que dire d'autre ? Je suis calme, je ne m'énerve pas facilement mais si ça arrive, je peux aboyer très fort. Je ne mors jamais sauf si on me le demande. Je suis d'ailleurs tellement calme et discrète qu'on ne m'entend pas arriver dans une pièce parfois. C'est dans ces moments-là que je peux faire les pires vannes. Je n'aime pas que toute l'attention soit rivée sur moi, je dois même dire que je déteste ça. Mais je sais demeurer imperturbable, du moins en apparence, me tenant aussi stoïque qu'un rocher sur lequel coulerait de l'eau.

Après, quand il s'agit de boulot, mon air sérieux n'est plus seulement feint. Mon poste dans les forces spéciales n'est pas uniquement décoratif et j'ai fait mes preuves sur le terrain. Je suis limite maniaque, détestant laisser un point d'interrogation sur quelque chose qui n'a rien à faire là. Je prends toutes les précautions nécessaires pour ne pas laisser mon équipe ou les gens que je suis chargée de mener dans le flou, c'est mon rôle quoi. Je suis attentive et efficace, mais pas encore assez expérimentée pour monter d'un grade. Cependant, même si j'ai encore des choses à prouver, le temps se chargera de m'appuyer.

Je suis très patiente d'ordinaire, et il en faut beaucoup pour me pousser dans mes derniers retranchements. Car aboyer ne veut pas dire que je perde mon sang-froid, juste que l'agacement monte et qu'il faut que je le manifeste. Je déteste l'effet bombe à retardement. Je déteste perdre le contrôle de moi-même et fais le maximum pour que ça n'arrive pas. Sinon, je peux être très sympa mais ne me demandez pas de sourire, je ne le ferai que de ma propre initiative.

Oui, vous l'avez bien vu... Je suis petite. Heureusement, mon mètre soixante ne m'a pas empêchée de m'engager dans l'armée mais c'était vraiment la limite. Sinon, que dire... J'ai les cheveux noirs avec une coupe au carré, un visage inexpressif mais néanmoins féminin, ce qui dénote quand même avec mon physique de jeune adolescent. Pour ça qu'on m'appelle "jeune homme" avant de voir mon visage.

Malgré mon petit gabarit et mes cinquante-trois kilos tous mouillés, je suis plutôt finement musclée sans être pourvue de formes avantageuses comme la plupart des femmes que j'ai pu croiser. Car mon appartenance à l'armée terrienne m'a poussée à m'impliquer dans les arts martiaux, ce qui m'a apporté une certaine discipline et un maintien plutôt strict. Toujours droite peu importe les circonstances, on pourrait me croire guindée alors qu'en fait, c'est la force de l'habitude. Me détendre ? J'essaierai peut-être un de ces jours...

Sinon, je suis tout ce qu'il y a de plus garçon manqué. Je m'habille en mec le plus gros du temps, le maquillage et les fringues flashy, ce sont des trucs de filles. Je préfère être passe-partout, portant surtout des fringues noires qui me mettent peu en valeur, mais ça c'est mon choix. Les seules exceptions (et encore) concernent les soirées officielles : je peux porter des robes mais elles sont toutes noires avec parfois quelques touches de rouge, ça serait la seule couleur que j'ajouterai... Bah oui, je suis un peu gothique mais bon.

Et je sais pas, mais je pensais pas que le style glaçon pouvait attirer les hommes... Surtout que je ne fais pas spécialement attention à eux de ce point de vue là. Je suis un camarade, et j'aime bien les tapes sur le dos un peu bourrues. Enfin, surtout les faire quoi.

Une histoire banale, parmi les histoires banales... Mais bon, il faut vraiment que je vous la raconte hein ?

Je suis née à New York, il y a vingt-quatre ans. Mon père était militaire de carrière, un grand commandant d'une des unités d'infanterie mobile qui faisait honneur à la famille Reed, fervente conservatrice des traditions militaires. Je suis fille unique alors vous imaginez une petite fille à NY... Il a fallu que j'apprenne très tôt à me défendre et heureusement, ce n'était pas bien difficile. Parce que mes grands-parents paternels ont aidé ma mère à m'élever, vu que mon père était absent le plus souvent. Mon grand-père, un général à la retraite, m'a poussée à me comporter comme un garçon, il aurait tellement préféré avoir un petit-fils qu'il me considère un peu comme tel.

Je ne lui en ai jamais voulu, parce que je sais comment il est. C'est un homme sévère, un militaire, et ses enseignements ne m'ont jamais déplue au final. Si bien qu'à à peine sept ans, je savais déjà que je m'engagerai. J'allais à l'école avec mon voisin de pallier, Edward Cameron. On a grandi ensemble et du plus loin que je me souvienne, nous avons toujours été amis. Il savait que j'étais une fille mais je me demande aujourd'hui s'il m'a toujours considérée comme un pote. À dire vrai, je préfère. Je n'ai jamais eu d'autres contacts avec les mecs qu'amicaux ou conflictuels, et je n'aimais pas trop traîner avec des filles. Toutes ces gamines en jupes et chaussures vernies me filaient radicalement la nausée.

À l'adolescence, Ed et moi avons choisi le même avenir, la même affectation. Nous sommes tous deux partis sur la Lune et y avons subi les mêmes entraînements, les mêmes études. Cependant, je n'avais jamais imaginé que nos tests d'aptitudes nous sépareraient de la sorte. Ma manière d'y répondre m'a ouvert la porte des Forces Spéciales de l'infanterie mobile. Ce fut lors de l'annonce de mon transfert que je vis Ed pour la dernière fois. Il m'avait souri avec fierté lors de nos adieux et je pensais bien ne jamais le revoir après ce jour...

L'entraînement plus intensif débuta. Il impliquait une maîtrise des outils de navigation précise, une instruction militaire plus soutenue, une connaissance plus poussée des armes et une expertise des arts martiaux. Je peux dire que c'étaient de belles années d'apprentissage, peut-être les meilleures que j'ai vécu jusque là. j'avais vingt-deux ans quand on me nomma Sergent des Forces Spéciales de l'infanterie mobile, juste au moment où la fin de la construction de l'Arche fut annoncée et où le recrutement fut lancé.

Bourrée de recommandations de supérieurs plus que satisfaits de mes résultats, je fut reçue dans les propres Forces Spéciales de l'Arche au même poste que j'occupais jusque là, ne souhaitant pas obtenir de grade supérieur, estimant que mon expérience n'était pas suffisante à ce moment-là. Nous partîmes donc avec 2579 autres personnes à la conquête de l'espace. Personne n'aurait pu prévoir que la plus grande structure jamais réalisée se crasherait sur une planète inconnue...

Nous perdîmes quelques hommes de notre unité lors de l'accident. Et l'on me força à voir régulièrement un psychologue pour me remettre de cette expérience traumatisante. Mais il fallut surmonter cela pour avancer, et les survivants avaient besoin de nous pour savoir où ils mettaient les pieds. Le Colonel Crescent nous mena en personne et nous rencontrâmes pour la première fois des autochtones. Une bataille s'ensuivit et nous réussîmes à capturer Aurélia Cicero, attendant de voir si Sorëan avait un dirigeant, ce qui ne tarda pas à être vérifié.

Depuis lors, les choses se sont calmées. Un traité a été mis en place selon lequel les humains seraient bien accueillis sur cette nouvelle planète. Les missions de reconnaissance se terminant, je fus envoyée dans l'infanterie mobile normale et dois de ce fait rencontrer bientôt mon nouveau supérieur. Mes qualités de tireuse et d'adaptation ne pouvant être relégués au rang de simple civile.

C'est ainsi que ma nouvelle aventure commencera en tout cas...

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