Lorsqu'on me regarde, les gens ont tendances à se dire que je suis quelqu'un de solitaire, avec un air sérieux. Indépendant, je vaque à mes occupations sans me soucier des autres. D'ailleurs, pourquoi est-ce que je m'en soucierais ? De tous ces péquenauds qui pullulent de çà et là, dont le seul but est de me gâcher mes journées. Je préfère ne m'occuper que de moi, de mon bien-être, car après tout, je suis le seul qui y pense.

Quand les gens m'abordent, tout peut s'enchaîner très vite. Dans un lieu quelconque, je jouerais plutôt le jeu de « je m'en fous de ce que tu me dis, dégage ! », mais si c'est au boulot, alors je peux passer du ton mielleux et hypocrite jusqu'au moment ou je dégomme les bijoux de familles d'un type avec sa propre invention.

Par contre, je parle ici de ce qui se passe dans 99% des cas quand je reçois un pseudo-inventeur dans mon bureau, mais des « vrais » inventeurs, j'en ai quand même déniché quelques-uns. Et dans ces cas-là, je sais me montrer particulièrement doux et attentionné. Si si, attentionné. Je chouchoute mes protégés pour facilité au mieux leur insertion dans l'académie.

Ma manière d'être, c'est de jouer sur le langage. Parfois, je me montre sarcastique avec les péons, car je sais qu'ils ne vont rien comprendre. D'autres fois, je me montre plus franc, plus cru dans mes propos, car j'ai la flemme de chercher quelque chose d'ironique à dire. J'aime torturer les gens, que ça soit mentalement ou physiquement, car cela me procure une joie immense et un profond sentiment de satisfaction.

Il n'y a pas beaucoup de personnes que je n'humilie pas à longueur de temps. Déjà, Hewine Arsion, parce que j'ai pas mal d'estime pour lui. C'est lui qui m'a montré la voie et assigné à mon travail, je le maudis parfois pour ça, mais bon jamais je le trairais. Dans la même logique, je ne toucherais pas à sa soeur, par égard envers lui, même si ça me démange parfois. Ensuite, même si ça me coupe, je n'ai jamais rien fait subir à Nycol, un de mes collèges, car c'était l'un des seuls que je tolérais pour discuter et puis si je me le mettais à dos, son invention me serait surement prohibé.

Déjà, je peux dire que je suis grand. 1m86 je crois. Je suis aussi très élancé, du coup on a l'impression que je suis très maigre, mais pourtant, proportionnellement à ma taille, je fais un poids tout ce qu'il y a d'acceptable. Je suis blanc de peau, un peu pâle selon certain, mais à cause de la vie stressante que je mène, il ne faut pas s'en étonner. Mes cheveux sont blancs comme la neige et j'aime les avoir longs. Je les attache pour qu'ils ne me gênent pas quand je travaille et je fais en sorte de toujours garder une frange sur mon oeil gauche, je trouve que ça me donne un air plus mystérieux.

Mes yeux sont marron tirant pas mal sur le grenat, c'est d'ailleurs pour cette raison que j'aime cette couleur. J'ai un visage assez plaisant à regarder, sauf si on me fait chié, là il se contorsion de façon bestiale qui n'a rien de séduisant. D'ailleurs séduisant je l'étais. Bien qu'étant né paysan, je pouvais désormais m'acheter une garde-robe des plus classieuse, alors j'en profitais. Je soignais mon apparence, presque à l'obsession, mais je n'étais pas maniaque, j'aimais surtout avoir la classe.

Je porte exclusivement des vêtements sombres, noirs pour la plupart, car le noir me va bien, il contraste avec ma peau et mes cheveux. Je porte au poignet un bracelet fin, ponctué de petites pierres précieuses rouges. On dirait que ce bracelet m’a été offert par quelqu’un que j’aime et c’est vrai, puisqu’il s’agit de moi. J’aime me faire des cadeaux et voir les gens cogités pour rien.

Je suis venu au monde dans un trou paumé, quelque part au sud du Duché de Ferel. Ma mère avait déjà mise au monde une fille, deux printemps plus tôt et moi j'arrivais en plein hiver. Mon père pensa que je ne survivrais pas, mais je lui ai prouvé le contraire. Je grandis dans mon village natal, un village de paysan ou le quotidien se répétait saison après saison. Au bout de mon seizième printemps, je n'en pouvais plus de tous ces péons, prisonniers de leur train-train et refusant toutes formes de progrès.

Déjà petit, j'avais développé une intelligence remarquable. Je raisonnais plus que les autres enfants, cherchant des réponses et de la réflexion là ou les autres recherchaient la féérie. Toutes les mains comptaient au village et les enfants étaient très vite réquisitionnés pour aider leurs parents. Ça pouvait aller de la simple besogne pour les plus jeunes à des tâches plus ardus pour les plus âgés. Comme j'étais le fils, c'était moi qui devais me coltiner la sale besogne, même si ma sœur était plus grande que moi.

Je déteste les travaux physiques à la chaine. J'étais crevé quand je me levais le matin et encore plus le soir. Au bout d'un moment, je me mis à réfléchir sur plusieurs moyens pour soulager notre quotidien. Quand je présentais mes recherches au mien, ils me réprouvaient sans cesse. Comme je les aie maudit, tous autant qu'ils étaient pour ne pas comprendre mon génie. J'ai donc décidé de partir de ce trou perdu et d'aller vivre ma vie ailleurs.

J'ai connu pas mal de galère au début, devant toujours travailler pour gagner de quoi vivre, ce qui me m'étais tout le temps de mauvaise humeur, mais comme je changeais souvent d'endroit, ça me parus moins rébarbatif qu'avant. Après un an passé, je suis arrivé à la capitale de Talrëa, Tilesse. Je suis resté un temps là-bas jusqu'à être engagé dans l'armée impériale. Au début, j'ai dû faire mes preuves, car vu mon jeune âge, on ne me confiait pas de choses intéressantes à faire et ça me tuais. Comme je leur montrais que j'en avais dans la tête, on m'affecta alors sous le commandement de celui qui gérait les machines de guerre.

Ces machines me fascinaient ou plutôt la manière dont elles fonctionnaient. Le temps que j'ai passé m'a été très bénéfique, car j'ai pu analyser de près comment le système de contrepoids et le mécanisme de torsion fonctionnait. Malheureusement, ça s'est gâté pour moi quand j'ai été surpris à en démonter une. Ils sont marrants eux aussi, comment je peux comprendre le fond d'une chose sans aller voir par moi-même ?

Ne sachant pas trop quoi faire maintenant, je décidai de retourner dans mon Duché d'origine, pour pouvoir balancer à la tête de ma famille tout ce que j'avais appris. Sur la route, comme quoi le hasard est bien fait parfois, je suis tombé sur un jeune homme de 15ans qui disait s'appeler Hewine Arsion et qui avait comme projet fou de créer une académie du savoir ou tous les inventeurs de Sorëan pourraient venir présenter leurs idées. Même si j'avais pensé que son projet était impossible, je buvais néanmoins chacune de ses paroles, rêvant moi-même à la mise en place d'un tel projet. Le jeune homme était en route vers la capitale pour faire entendre sa voix et celles de tous les inventeurs en général.

Je décidai alors de le suivre, de me battre moi aussi pour que l'académie puisse voir le jour. Pendant des années, nous avons travaillé d'arrache pieds pour que notre voix arrive jusqu'aux oreilles de l'Empereur. Avant, personne ne voulait nous prendre au sérieux, mais quand le fils de l'empereur prit sa place, non avons retenté notre chance. Ce dernier accepta finalement et nomma Hewine directeur de l'académie. J'étais à présent âgé de 23ans et j'étais très heureux que l'empereur accepte la mise en place du projet, car cela allait donner une meilleure réputation aux inventeurs. On avait déjà établi et aménagé l'académie pendant ces années ou nous cherchions à convaincre l'opinion publique, même si on n'avait pas vraiment le droit, mais bon, cela nous a fait gagner beaucoup de temps. En un mois, l'Académie des Sciences était opérationnelle.

Hewine décida alors, quand t'en que directeur, il allait me nommer responsable des entretiens des potentiels candidats qui pourront faire leurs recherches à l'Académie. Je trouvais ce poste inutile au début, car quels crétins allaient venir déposer sa candidature s'il n'a pas un minimum de créativité. Bon sang, ce que je me suis gouré ! C'est comme si tous les plus grands mytho s'étaient donné rendez-vous au même endroit. Alors, les premiers temps, j'en ai eu des boulets à virer et je me suis ainsi fait une terrible réputation qui pousse aujourd'hui ces péquins arriérés à réfléchir à deux fois avant de se présenter devant moi.

Pendant 3ans, je suis resté à l'académie, à faire mon boulot, à dénicher des perles d'inventeurs et à rabaisser tous les autres. J'ai aussi perfectionné mes inventions, créant récemment une beauté: une arbalète qui est capable de tirer en rafale. J'ai aussi mis au point plusieurs appareils qui... je pense donneront des résultats intéressants. Les choses ne changent pas et je ne crois pas qu'une étoile tombée du ciel va y changer quelque chose.